Pour être (enfin) en phase avec l’actualité il était grand temps de voir à nouveau LA HAINE de Mathieu Kassovitz. O joie ! Tellement d’années me séparent de la dernière vision de ce petit bijou ! O tristesse ! Tout le talent de ce jeune réalisateur gâché par des prétentions hollywoodiennes inutiles. Kassovitz n’a jamais été aussi percutant que lorsqu’il traitait de sujets qui lui étaient proches. METISSE affichait déjà un rajeunissement du cinéma français, amorcé sous le scalpel de Luc Besson. LA HAINE concrétise la magnificence de cette recherche. Et ASSASSIN(S) deviendra une œuvre crépusculaire, sombre et cynique, d’une beauté esthétique et idéologique tout à fait novatrice. Moins efficace que LA HAINE, le film pérorait plus qu’il ne cherchait à convaincre, et Kassovitz posait des questions philosophiques brutales sans vouloir se montrer intelligent. Il signait son chef-d’œuvre. S’il cherchait à s’adresser aux vrais instigateurs des problèmes qu’il abordait, LA HAINE cherchait plutôt à atteindre un plus large public pour mieux l’avertir de ce qui se trame sous le vernis des illusions de notre société.

La mise en scène de LA HAINE est proprement époustouflante. Les mouvements de caméra de Kassovitz sont d’une fluidité maîtrisée absolument sublime. Par leur lenteur ils génèrent un étouffement de nos préjugés afin de mieux nous laisser découvrir un quotidien très éloigné des stéréotypes médiatiques. Etat des lieux, évidemment. Violente critique, bien sûr. Les plans sont particulièrement soignés avec une mise en espace pleine de relief et qui fait même parfois penser à du Tarkovsky. Gros plans, effets d’optique, agencement des scènes à différents plans, travail non conventionnel sur les sons et puis surtout de longues scènes qui laissent la place à des personnages plus proches de la réalité que ne le seront jamais ceux de Lars Von Trier. Le montage est lui aussi éblouissant par ses brutales ruptures de rythme et les émotions qu’il fait naître là où on n’attendait pas qu’il surgisse. Il est sans cesse en rupture ce qui permet d’ouvrir les situations plus que les mots ne sauraient le faire. Ici, il nous fait penser à Michael Haneke. La comparaison est assez évidente et ce n’est pas un hasard si CACHE, s’attache aux mêmes éléments que LA HAINE. Dans le dernier Haneke, Daniel Auteuil est celui qui a le pouvoir. C’est lui qui, par le passé, a humilié Maurice Bénichou et l’a fait écarter pour ne plus avoir à vivre proche de lui. Des années après, il continue à ne pas se sentir coupable de son action. C’est du moins ce qu’il avoue à Maurice Bénichou. Plusieurs suppositions. Soit il lui dit par peur : il essaie d’asseoir son pouvoir en lui montrant le peu d’effet qu’il a sur lui. Attitude méprisante. Soit il est vraiment sincère et ne se rend même plus compte qu’il fait un nouvel affront à celui qui ne pourra jamais oublier ce qui les lie. Ou alors il avoue délibérément cet état de fait et ce n’est qu’une nouvelle attitude arrogante que Maurice Bénichou ne peut encaisser. Une dernière supposition serait que Daniel Auteuil le considère comme il l’a toujours fait et ne puisse s’empêcher de le rabaisser et de le discréditer. Si les années n’ont rien changé aux sentiments qu’il éprouve pourquoi son attitude envers Maurice Bénichou aurait-elle changée ?

10 ans depuis LA HAINE et rien n’a changé non plus dans nos banlieues. Les choses se sont même aggravées puisque rien n’a été entrepris. Je ne parle pas d’actions sociales mais d’une révolution des mœurs. Nos politiques continuent à adopter les mêmes attitudes et à traiter avec la même arrogance ceux qu’ils considèrent comme de la racaille. S’il en existe, ce sont eux qui l’ont éduquée. Comme la haine appelle la haine, ils feraient mieux d’apprendre à diriger la leur s’ils ne souhaitent pas qu’elle leur soit retournée en pleine face. « Sarkozy doit démissionner ou s’excuser ». Non, bien évidemment, il doit faire les deux. S’excuser est bien plus important, car il faudrait par la même occasion qu’une belle brochette le suive dans sa démarche. C’est aussi une belle preuve d’intelligence que de reconnaître ses torts. Malheureusement aucun de nos politiques n’est capable de le faire. Selon Kassovitz « toute société a les crimes qu’elle mérite ». Les émeutes des jours derniers ne sont pas des actes isolés qui font suite à une partie de cache-cache dans un transformateur E.D.F. Ce malaise trouve ses racines dans une situation qui a atteint ses limites au sein d’une période tourmentée.

C’est aujourd’hui et c’est en France que ça se passe. Un pseudo acteur comme Samy Nacéri se permet dans l’émission de Thierry Ardisson de menacer de mort Salman Rushdie et quasiment personne ne s’insurge. Heureusement que notre bon Charlie Hebdo nous a rapporté cet épisode censuré par Ardisson lui-même. Comment en est-on arrivé là ? Et surtout comment peut-on laisser ce délinquant reconverti dans le cinéma, proférer de telles injures envers une personne qui vit de son talent et non pas de sa célébrité ? Samy Nacéri n’a jamais été un bon comédien. Dans quoi a-t-il joué déjà ? TAXI ! (rires épileptiques !!!). Peu importe, on peut très bien faire du cinéma sans la moindre once de talent. Par contre, il a fait de la prison et son fichier continue à être plus prolifique que sa filmographie, c’est dire. Mais, à chaque fois, il n’écope que du sursis. On ne peut plus s’en étonner quand on sait que son avocat est le même que celui de Jacques Chirac. Il y a bien une justice à deux vitesses, comme le disait Coluche. Samy Nacéri n’a pas besoin de notre argent ni de notre considération. Ce n’est pas une raison pour boycotter joyeusement ses prochains films. Boycottez plutôt les prochains films de ceux qui n’ont aucun respect pour la vie humaine et professent des menaces de mort sur les plateaux de télévision.

Sur le même plateau, Jeanne Moreau jouait à Jeanne Moreau, samedi dernier. S’exprimant sur ces émeutes : « Ces personnes ont subi trop d’humiliations et c’est irrattrapable. » Irrattrapable, c’est vous qui l’êtes mademoiselle Moreau. Ces humiliations ne sont pas oubliables, je suis bien d’accord. Dans CACHE, Maurice Bénichou n’a pas oublié, et puisque Daniel Auteuil ne veut rien rattraper, il le fait venir chez lui et se tranche la gorge devant lui. Les représailles sont les mêmes aujourd’hui. Ce sont leurs voitures que ces jeunes brûlent. Celles de leurs voisins, de leurs amis, de leurs parents. Le message est clair, cette fois-ci. Le sort de ces personnes n’est pas rattaché à quelques biens matériels. Ils n’ont pas grand-chose et sont capables de le détruire car s’il ne suffit plus de crier alors il faut hurler. Faire du bruit. Se positionner. Faire passer le message de haine reçu depuis plusieurs années. Montrer que le pire est à craindre. Il faut redouter ce qui peut arriver de personnes qui sont prêtes à tout, qui sont prêtes à se tailler une seconde bouche en pleine gorge pour pouvoir enfin sourire.

Mais là où je ne crie pas VIVA MARIA ! c’est lorsque vous pensez que tout cela est « irrattrapable ». Non. Cent fois non. Ce n’est pas sans issue. Et ça commence aujourd’hui, comme dirait Terry Kevin. Ah non ! Ce n’est pas lui… Je sais plus c’est qui. Une autre bière, tavernier !... Bon, comme je disais avant de me couper la parole aussi grossièrement, rien ne pourra faire oublier à ces personnes ce qui leur est infligé. Mais la reconstruction du lien passe par un changement radical des comportements politiques à leur égard. La répression n’est qu’un éloignement tectonique de deux continents qui jadis étaient liés. « La politique est out » selon notre bon vieil ami Happy Harry La Trique de PUMP UP THE VOLUME, le film le plus subversif jamais réalisé. N’espérons pas beaucoup. En attendant, il faut se battre, il faut hurler. Il y a des émeutes ! Mon Dieu !! Mais je vais aller en prison alors !!! C’est un réveil plus qu’autre chose. Il est temps d’afficher sa différence. « Faites des choses dingues » dixit Happy Harry. Rien n’est plus important que de dire des horreurs. Aux armes ! Oui, aux armes !!! Happy Harry vous dit d’ouvrir l’antenne, elle est à vous. Innovez. Sinon imitez. Faites tourner. La vérité est un virus. Développez votre créativité. Faites connaître votre opinion. Ouvrez des blogs. La communication et le partage n’ont plus de limites. Ecrivez ce que l’on nous cache. Les jeunes sont la force de ce pays. Ce sont eux qui peuvent faire changer les choses car ceux qui nous dirigent ne savent pas comment les contrôler. Ce sont des jeunes qu’ils ont le plus peur. Y’a plus de petits enfants sages !!! Battez-vous avec vos armes mais ne laissez plus personne vous dire qui vous êtes.

Et dites des horreurs !!!

            So be it.

10 points :

Et voici la première image :

QUESTION : L’ASSASSIN HABITE AU 21. Mais dans quelle rue ?

Question de rapidité...

QUESTION : Dans quel film un ordinateur dit : « I’m sorry, Dave. I’m afraid I can’t do that » ?